Société

3 avril 1986-3 avril 2024 : 38 ans de lutte pour le mouvement féministe haïtien

Femmes-Haitiennes
Depuis les temps de l’esclavage,  en passant par la révolution, nous, femmes, nous nous sommes toujours battues. Aux côtés des hommes dans cette quête de bonheur et de liberté pour notre nation. Nous nous sommes battues contre les blancs, les blanches, les affranchis et même les nègres parfois. Pour nos droits, notre vie, notre féminité, notre existence.

Nous n’avons jamais cessé de nous battre, en dehors même de toute reconnaissance de la part de nos frères. Au lendemain de l’indépendance, quand nous étions considérées comme des mineures au même titre que les enfants, quand nous ne pouvions posséder des titres de propriété, acheter, vendre, ester en justice, dénoncer les crimes et injustices dont nous étions sujettes. Quand cette terre pour laquelle nous avons combattu s’est avérée hostile à notre épanouissement humain. Nous nous sommes battues. Quand l’occupation américaine a survenu, nous nous sommes battues, à la ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté.

Nous nous sommes battues en 1934 pour créer la Ligue Féminine d’Action Sociale – premier regroupement féministe haïtien – pour faire passer nos revendications en matière de droit, de libertés fondamentales et d’égalité. Nous nous sommes battues pour obtenir, 10 ans plus tard, le droit de vote, de participer à la vie politique du pays et pour l’exercice effectif de nos droits politiques en 1957.

Jamais, nous n’avons cessé de nous battre, le régime duvaliériste nous a peut-être mis sous silence pendant des années mais cette soif de la liberté, de la vie et de l’égalité n’a pas su et ne saura s’éteindre. Nous avons su ranimer cette flamme quand, le 3 avril 1986, près de 30 000 femmes ont manifesté leur désir de se faire entendre, de faire valoir leurs droits.

Nous nous sommes battues pour criminaliser le viol en Haïti, pour la loi sur la filiation et la paternité responsable…

Aujourd’hui encore nous nous battons, nous revendiquons notre corps mis en avant comme butin de guerre dans la violence des gangs armés, contre la violence basée sur le genre, l’impunité, le harcèlement, le viol et pour tant d’autres causes encore.

Nous nous battons pour l’effectivité de nos droits, pour ces acquis fragiles, constamment menacés, contre le triomphe du patriarcat et contre la misogynie. Nous nous battons pour nos sœurs qui ne peuvent se battre elles-mêmes.

Jamais ils n’ont cessé de nous donner des raisons de nous battre et jamais nous ne cesserons de nous battre.

Cette terre nous appartient, et même sur nos cendres, nous nous battrons, comme des humains, comme des femmes dignes de ce nom, pour nos droits, pour notre vie, pour nos enfants.

Qu’Haïti vive ! Que nos femmes vivent !

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