18 mai : et si on célébrait aussi l’Université ?

18 mai : et si on célébrait aussi l’Université ?

Tandis que la nation rend hommage à son drapeau chaque 18 mai, une autre fête passe sous silence : celle de l’Université. Pourtant, dans un pays en quête de repères, négliger cette institution, c’est négliger l’intelligence collective, l’avenir et la reconstruction possible d’Haïti.

L’Université : conscience vivante d’un peuple

L’Université n’est pas un simple lieu de transmission de savoirs. C’est le cœur battant de la pensée critique, l’âme rationnelle d’une nation. C’est là que s’élaborent les alternatives, que se forment les esprits capables de lire leur époque, d’en dénoncer les dérives et d’en proposer de nouveaux chemins. Jean Jaurès disait :

« L’université doit être l’âme de la nation ».

Et si cette âme se tait ou s’affaiblit, c’est toute la société qui vacille.

En Haïti, l’Université, notamment l’Université d’État fondée en 1945, a longtemps porté ce rôle : former des générations d’intellectuel·les, d’ingénieur·es, de juristes, de médecins, de chercheur·es engagés. Elle a été la gardienne de la rationalité dans des contextes troublés, un bastion de résistance contre l’ignorance institutionnalisée.

Mais que reste-t-il de cette mission en 2025 ?

Tandis qu’on oublie de célébrer l’Université, les plus belles têtes du pays prennent la route de l’exil. Chaque année, des jeunes brillants quittent Haïti vers le Canada, la France, les États-Unis, le Chili ou le Brésil. Ils fuient l’insécurité, l’instabilité institutionnelle, le mépris de l’excellence. Le pays investit dans leur formation, puis les abandonne dans des systèmes sans vision, où le mérite est souvent sacrifié sur l’autel du clientélisme ou de la survie.


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Cette hémorragie intellectuelle est une plaie ouverte. Elle prive Haïti de ses meilleures chances de reconstruction. Elle est aussi le signe d’un échec collectif : celui de n’avoir pas su créer les conditions pour retenir, valoriser et célébrer ses propres forces vives.

Le 18 mai : un appel à la mémoire et à la réappropriation

Fêter le drapeau, c’est bien. Mais qu’est-ce qu’un drapeau sans la pensée qui l’interroge, sans les institutions qui lui donnent un sens vivant ? Le 18 mai devrait aussi être la fête de l’Université. Ce serait un acte politique fort, un geste symbolique pour rappeler que sans savoir, il n’y a pas de souveraineté réelle.

Il est urgent de redonner une voix, une visibilité et une dignité à l’Université. Pas seulement par des discours creux, mais par des investissements, des célébrations, des réformes audacieuses et une volonté claire de reconstruire l’intelligence publique haïtienne.

Le drapeau haïtien est né dans la lutte. L’Université, elle, naît dans la lumière. Ensemble, ils symbolisent ce que peut devenir Haïti : un pays debout, libre, éclairé. Le 18 mai ne devrait plus être un rendez-vous tronqué. Il doit devenir le jour où l’on honore à la fois la dignité retrouvée et l’intelligence reconquise. Car un pays sans Université célébrée est un pays sans projet de société.

 

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Oggi Regis

Fondateur & PDG de Bèlide Magazine | Brand Designer

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