Le vendredi 31 Mars 2023, Mme Dominique Dupuy, la déléguée permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO, a annoncé la candidature officielle de la Cassave au registre du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Après la Soup Joumou, une autre de nos pratiques alimentaires est en passe d’avoir une reconnaissance internationale.
Le 16 décembre 2021 dernier, c’est avec fierté que les haïtiens du monde entier ont appris la rentrée de la Soupe au Giraumon dans la prestigieuse liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Selon la définition de l’UNESCO, l’appellation PCI désigne les pratiques que les communautés reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel et qui leur procurent un sentiment d’identité tel qu’elles deviennent, à leurs yeux, dignes d’être transmises aux générations futures. À noter que l’un des principaux critères pour intégrer cette liste est que la pratique en question présente un intérêt universel. Avec sa portée historique, son importance dans la cohésion sociale et sa place dans la célébration de l’Indépendance d’Haïti, la Soup Joumou a évidemment coché toutes les cases.
Quant à la cassave, c’est un mets traditionnel haïtien à base de manioc. Dans les cassaveries du pays, sa préparation à des fins commerciales requiert une bonne maîtrise des outils traditionnels comme la platin (plaque en métal ou l’on étale la farine de manioc pour sa cuisson) ou le palèt, petit instrument en bois qui sert à dimensionner la cassave. Généralement, la cassave est consommée avec du mamba, mixture haïtienne préparée avec de l’arachide, du sel (ou du sucre) et un peu de piment. Mais il y en a aussi certains qui préfèrent la manger avec des avocats ou du café. Dans la société haïtienne, cette pratique culinaire est souvent liée à la ruralité en dépit du fait qu’elle est consommée partout, même au sein des familles qui habitent le milieu urbain.
La cassave est aussi présente dans d’autres pays de la Caraïbe, notamment en République Dominicaine. À un certain moment, il a même été question d’une candidature en commun comme l’a fait le Maroc, la Tunisie, la Mauritanie et l’Algérie pour la Couscous. Mais après l’annonce de Madame Dupuy, nulle doute qu’il n’en est plus question.
Pour avoir cette reconnaissance mondiale, il y a un autre critère tout aussi important que l’intérêt universel, c’est la qualité du dossier de candidature. Cette qualité peut se constater à travers la fiche d’inventaire de la pratique. Et sur ce point-là, pas d’inquiétude à avoir. En effet, tout comme pour la Soupe de l’Indépendance, la collecte des données nécessaires pour monter le dossier de candidature de la cassave a été effectuée par huit enquêteurs et enquêtrices issus de l’Université d’Etat d’Haïti (UEH), plus précisément de l’Institut Supérieur d’Études et de Recherches en Sciences Sociales (IERAH/ISERSS). En début d’année 2021, plusieurs équipes ont été déployées dans divers départements du pays, notamment l’Ouest, le Centre et le Nord, pour rencontrer les personnalités, institutions et communautés porteuses des connaissances et savoir-faire relatifs à la production et la consommation de la Cassave. Étant donné que notre fameuse soupe a été classée en un temps record, on peut oser espérer que la cassave connaisse le même sort.
Pour la postérité, ces étudiants et étudiantes en Histoire de l’Art et Archéologie et en Patrimoine et Tourisme qui ont abattu un travail de très grande qualité, répondent aux noms de Godson ANTOINE, Aurélus Sthalina DESPAS, Pierre Moise Vilson FLEURANTIN, Leïla Nicky FRANÇOIS, Naïka JOSEPH, Herbert NERETTE, Francia PIERRETTE et Dawinson PRICE. Pour leur faire honneur et pour célébrer la diversité de notre culture, profitons de chaque occasion qui nous est donnée pour savourer la cassave.
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