Si l’on décidait de parler en long et en large d’un cinéma de qualité typiquement haïtien, une bonne majorité ferait mention de celui de l’époque contemporaine du septième art haïtien, sans trop pousser dans le temps. Au fil des années, on peut tout de même dire que cet art a évolué avec son temps, qu’il s’agisse d’avis autant subjectifs que objectifs. Dans notre nouvelle époque, on reconnaît comme cinéma le plus populaire, les différents films et « feuilletons » en vogue sur la plateforme YouTube qui laissent tout de même à discuter. Ces courts et longs métrages sont caractérisés par les performances de jeunes amateurs qui redéfinissent parfois toutes les lois ou l’idée même du cinéma que l’on connaissait avant.
Existe-t-il une comparaison possible entre ces deux époques cinématographiques ? Oui, il est plus que certain que ce n’est pas la même production entre ces deux ères. Dans les grandes années antérieures, le cinéma haïtien était à son âge d’or, on appréciait les œuvres de grands cinéastes qui ne manquaient point de se démarquer en tout genre. À première vue, on remarquait le grand réalisateur, son matériel hors norme, sa grande équipe et compagnie… mais surtout on faisait à peine connaissance avec ce septième qui prenait à peine son expansion dans la culture haïtienne. Le cinéma haïtien était donc bien catégorisé, et ce n’était pas toujours donné à tout le monde de jouir ou de produire quelque chose de plus ou moins similaire.
Avec les années qui ont suivi, notre cinéma a pu évoluer, adopter et s’adapter aux influences internes qu’externes afin de toujours marcher avec son temps. Aujourd’hui, on parle de cinéma « classique » qui représente le cinéma pionnier avec lequel on a grandi, on parle également de « YouTube », une toute autre affaire. Pour être plus clair, on peut dire que tout ce qui y a contribué à ces déclinaisons du cinéma haïtien c’est l’avancée technologique imminente. Tout l’arsenal qui était nécessaire à la réalisation ou la production d’une œuvre est remplacé par des éléments plus « à portée » de tout le monde. Avoir un smartphone de qualité et quelques amis supporteurs est mieux que tout une équipe comme celle affichée pendant plus d’une demi heure dans le générique de fin d’un blockbuster américain.
On parle donc, d’un côté, d’une vulgarisation de cet art connu dans le monde entier, un art qui nécessitait clairement beaucoup plus de ressources pas toujours facile à détenir comme l’équipe, les matériels, le budget, etc… un art fait avec les moyens du bord mais cependant néglige un peu les conventions qui étaient là depuis le début qui laissent donc entrevoir que notre bon vieux cinéma a pris un gros « choc ». De tout ce procédé a donc pu se populariser le phénomène des feuilletons « YouTube » qui laissent faire leur auto-promotion sur la plateforme gratuite au logo rouge et blanc. Comme mentionné, le cinéma reste du cinéma, mais pour les conventions qui ont élevé et fait croître le cinéma comme on le connaît, on pourrait presque parler de boycottage. Mais ne serait-ce pas aussi dû au manque d’encadrement ?
Ce cinéma qui n’a point cessé de se populariser à partir des années 2010 reste néanmoins amateur, ce qui fait que le jeu d’acteur est à revoir. Contrairement aux premiers, on ne peut pas vraiment parler d’une formation poussée pour les acteurs ou les réalisateurs. Quelques incohérences de scénarios visibles sont clairement négligées à corriger. Des détails importants sont mis de côté alors qu’ils devraient être un point clé de l’œuvre, tandis que d’autres ne sont même pas pris en compte. Il existe bien d’innombrables failles à ce phénomène qui ne manque pas de prendre de l’ampleur malgré tout. Ce qui le rend donc aussi populaire et apprécié par la nouvelle génération c’est donc sa vulgarisation et sa facilité. Tout le monde peut être acteur ou réalisateur, suffit de savoir dire quelques phrases ou de tenir une caméra.
Apprécié ou non, on compte plus de productions « YouTube » dans la filmographie haïtienne que dans les grands studios haïtiens depuis l’expansion vertigineuse de cette industrie. Nos acteurs et réalisateurs de l’âge d’or de notre cinéma sont devenus plus discrets à l’inverse des YouTubeurs qui ne ratent point l’occasion de profiter de l’application gratuite et de ce que peut offrir leurs appareils intelligents avec un faible budget, ou pas du tout, mais avec des gens très motivés. Il reste loin de tout l’effort artistique déployé dans les œuvres que l’on connaît bien mais l’intention de garder le cinéma haïtien en vie n’est pas cachée.
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